Tristes records en 2023 en Méditerranée
Les décès de migrants et le nombre de bateaux civils de sauvetage bloqués ont tristement augmenté en 2023. Plus de soixante organisations alertent sur cet état de fait. Par une déclaration conjointe, elles demandent aux États membres de l’Union européenne de cesser immédiatement d’entraver les efforts civils de recherche et de sauvetage en mer Méditerranée centrale.
Actuellement Aurora, Open Arms et Sea-Eye 4, trois navires civils professionnels de sauvetage en mer, sont empêchés d’opérer en Méditerranée centrale. Les trois ordres de détention, émis en moins de 48 heures, s’ajoutent aux nombreux cas d’obstruction administrative auxquels les ONG de sauvetage en mer ont été confrontés cette année. Depuis le début de l’année 2023, il y a eu huit cas d’immobilisation de navires d’ONG par l’Italie.
Ainsi, les navires civils professionnels de sauvetage en mer, Aurora, Geo Barents, Louise Michel, Mare*Go et Sea-Eye 4, ont été entravés chacun pendant vingt jours. Le 21 août, le navire Aurora a été détenu une deuxième fois pour vingt jours, suivi du navire Open Arms, détenu un jour après. Le temps perdu de ces cent quarante jours aurait pu être utilisé pour des opérations de sauvetage et pour prévenir les naufrages qui se produisent chaque jour dans la Méditerranée centrale. Rappelons que jusqu’à 600 personnes ont perdu la vie au large des côtes grecques en juin 2023, dans un nouveau naufrage qui aurait pu être évité.
Ce harcèlement administratif est s’est aggravé avec une loi récente adoptée par l’Italie (Décret-loi n° 1/2023, modifié par la loi n° 15 du 24 février 2023), laquelle accroît les exigences imposées aux navires des ONG et introduit des sanctions en cas de non-respect de ces exigences. En vertu de cette loi, les autorités italiennes ordonnent aux navires de sauvetage civils de se diriger vers un port assigné immédiatement après un sauvetage — même dans des situations où il y a encore des bateaux en détresse à proximité du navire de l’ONG. La loi est aggravée par la pratique du gouvernement italien des « ports éloignés », qui oblige les navires des ONG à débarquer les personnes secourues dans des ports situés jusqu’à 1 600 km et 5 jours de navigation du lieu du sauvetage. Selon le droit international, le débarquement des personnes en détresse sauvées en mer dans un lieu sûr doit avoir lieu « dans les meilleurs délais raisonnablement possibles ». Pourtant, depuis décembre 2022, les autorités italiennes ont assigné un port inutilement distant aux navires des ONG dans plus de soixante cas.
En outre, elles ont récemment demandé à plusieurs reprises aux navires des ONG de demander un lieu sûr en Tunisie pour les personnes secourues en mer. En raison du manque de protection envers les demandeurs d’asile dans ce pays et face à la recrudescence de violence envers les populations migrantes, la Tunisie ne peut être considérée comme un lieu sûr. Le débarquement de personnes secourues en mer sur ses côtes pourrait constituer une violation du droit international.
Cela signifie que cette nouvelle législation fait pression sur les capitaines de la flotte civile pour qu’ils désobéissent au droit maritime international et au devoir de sauvetage.
Le non-respect des ordres illégitimes des autorités italiennes a déjà entraîné des amendes allant jusqu’à 10 000 euros pour les ONG et la détention pendant 20 jours de six navires de sauvetage. Non seulement toutes les ONG qui effectuent des opérations de recherche et de sauvetage en mer risquent désormais de se voir infliger d’autres amendes et détentions, mais la loi prévoit également la saisie du navire, ce qui entraînerait l’arrêt définitif de leurs opérations.
Un appel urgent à l’UE et à ses États membres est lancé par ces soixante organisations : si les entraves à l’aide humanitaire en mer se poursuivent, d’ici la fin de l’année, une diminution drastique, voire l’absence totale de navires de sauvetage civils en mer pourrait survenir. Les conséquences seront d’autant plus meurtrières que la restriction importante des opérations civiles de sauvetage en mer n’empêchera pas les personnes de tenter la traversée.
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Plateforme des Comités d’Accueil des Réfugiés
en Drôme-Ardèche et Vaucluse (Cardav)
Valérie Rosier – Coordination
Tél. 06 12 33 10 71 valouchka26@gmail.com
Mira Pons – Rédaction
mirapons@gmail.com